jeudi 17 mars 2011

Cluj avant Cluj

Cluj ne m'était pas tout à fait inconnue quand j'y suis arrivée à la mi-mars. Je l'avais déjà vu en plein été, les enfants jouant dans les fontaines de la place Unirii, puis en plein hiver, la neige ayant tout envahi. A en croire mon expérience en Bulgarie, en arrivant le 15 mars, j'avais une chance sur deux d'avoir soit l'hiver, soit l'été. Les martenitsa / mărțișoare ont sûrement aidé, Baba Marta a été clémente. 


En juillet, j'étais arrivée à Cluj après un long voyage en bateau puis en train depuis Sfantu Gheorghe, dans le delta du Danube. J'avais eu l'impression de me réveiller -très tôt si je me souviens bien- dans un autre pays. C'est vrai qu'entre la Bulgarie et le sud de la Roumanie, à part la langue, pas grand chose ne change vraiment. Mais Cluj se trouve de l'autre côté des Carpates : de l'empire ottoman, on passe à l'empire austro-hongrois. Je me souviens avoir laissé mon sac à dos à la consigne de la gare (il y en a presque partout, et en France presque nulle part : la Roumanie est voyageurs-friendly) et avoir marché le long de la longue rue Horea, qui mène au centre-ville, les yeux levés sur ces bâtiments que j'avais tous envie de photographier.

Piața Unirii

Boîtes aux lettres cadenassées intrigantes

 J'avais été très impressionnée par le très beau jardin botanique, où notamment j'avais retrouvé sous verre un coquillage (ou un fruit séché ?) étrange qu'on m'avait donné à Sfantu Gheorghe et qui apparemment ne "vit" (ça vit un coquillage ?) que là-bas.


La messe : en hongrois, roumain, allemand et français

Arpad, le Couchsurfer qui m'avait accueillie, et Reka, une autre Couchsurfer rencontrée à Cluj, m'avaient permis de mieux comprendre Cluj et son multiculturalisme. Etant eux-mêmes "Hongrois de Roumanie", leur relation à la Roumanie et à la Hongrie était très intéressante. J'avais été frappée que, contrairement à ce qu'on attend des minorités frontalières (comme les Turcs de Bulgarie), les Hongrois de Roumanie ne semblent pas considérer la Hongrie comme "mère patrie". Deux premières rencontres de Cluj très sympas.

Puis le voyage s'était poursuivi à Timișoara (pour quelques jours très marquants au festival IRAF, où j'ai rencontré des gens extraordinaires, comme Andreea et Victor ou Tjaž), puis vers la Slovénie... Mais si je commence je ne parlerai jamais de Cluj !

Retour en Cluj en février, trente degrés de moins. De l'avion, tout était blanc (sauf la piste d'atterrissage). Ce weekend était consacré à la 5e rencontre du réseau Transeuropa. On n'a pas eu le temps de voir grand chose, ces weekends sont toujours très intenses. C'était quand même moins frustrant qu'à Rome (où je ne suis justement allée qu'une fois pour une de ces rencontres, sans rien voir du tout), car j'avais déjà mes repères. Et en parlant de repères... En marchant de l'endroit où on était allé manger vers le lieu où on était réuni (et où on a passé tout le weekend), j'ai aperçu une silhouette très familière - mais pas du tout familière de Cluj : Jose, mon colocataire espagnol de Sofia ! On ne s'était pas écrit qu'on allait à Cluj, je n'avais aucune idée d'où il était en Europe, et lui non plus pour moi. En ajoutant à ça le fait qu'il passait un jour par Cluj entre Berlin et Sofia (d'où il partait la semaine suivante pour rentrer en Espagne), le fait que je n'y étais aussi que deux jours, et qu'on aurait très bien pu ne jamais se croiser et ne jamais l'avoir su, ça donne envie de penser que l'Europe n'est pas si grande tout compte fait.

Sam et Jose
Après le retour de Cluj début mars, le départ est devenu quelque chose de plus tangible : il fallait commencer à se demander où je vivrai, à dire au revoir, à organiser le déménagement...

mercredi 16 mars 2011

On the road... again

Balkans-Transit, la suite ! Le voyage commence à Cluj-Napoca. Ici, c'est la Transylvanie, les Balkans sont bien au Sud, rien à voir, me dit-on. D'où la nécessité d'un nouveau blog. Au moins, "Sur la route", ça n'engage pas trop géographiquement comme titre : qui sait, ce blog pourrait peut-être même survivre à ce séjour roumain ?

Je reprends avec plaisir les vieilles habitudes du blog que j'ai tenu l'année dernière en Bulgarie, jusqu'en juillet dernier, donc voici pour commencer une carte :


On ne me croyait pas toujours en France, mais si : Cluj-Napoca est une des plus grandes villes de Roumanie. Et en tout cas clairement une des villes qui bougent le plus. Presque un demi million d'habitants, beaucoup d'étudiants, des facs en roumain, hongrois et allemand (la ville s'appelle Cluj-Napoca, Kolozsvár ou Klausenburg selon la langue), une vie culturelle qui n'arrête jamais, pleins de petits cafés et bars alternatifs...

C'est toujours un peu la pression, le premier post du blog. Par quoi commencer ? Comme toujours se pose la question des lecteurs. Sans doute que la plupart d'entre vous savez déjà tout ça parce que vous ne tombez pas sur cette page par hasard et qu'on se connaît. Mais quand même, voici quelques lignes sur comment je suis arrivée ici à Cluj.

Jusqu'en juillet 2009, l'Europe de l'Est était pour moi un grand point d'interrogation, un bloc loin là-bas où l'on parlait des langues étranges, où l'on mangeait de bons yahourts et où le communisme avait marqué le dernier demi-siècle. J'ai ensuite passé un an en Bulgarie, à Sofia et à Sandanski, comme volontaire européenne pour le Balkan Youth Festival, année en grande partie "responsable" de mon retour en Europe de l'Est. Le blog Balkans-Transit s'arrête à mon départ de Bulgarie pour un voyage d'un mois en Roumanie, Slovénie, Croatie, Monténégro, Bosnie et Serbie, après lequel je suis rentrée en France deux semaines, repartie en Bulgarie pour le 15e Balkan Youth Festival, puis à nouveau rentrée (cette fois "définitivement") en France, le jour (dure journée) de ma rentrée pour le dernier semestre d'études.

Cluj-Napoca, juillet 2010

Cluj-Napoca, juillet 2010

Ce semestre à Paris, je me suis peu à peu investie dans les activités d'Alternatives Européennes, une organisation transnationale de citoyens réunis par l'idée que beaucoup de questions débattues uniquement dans l'espace public national (si elles sont même débattues ; en fait les questions souvent les plus "politiques", touchant aux migrations, à la protection sociale, aux droits des minorités, etc.) doivent être portées au niveau européen. L'idée n'est pas que l'Europe doive désormais remplacer les États nations, car d'une part, ce n'est pas l'ambition de l'UE de devenir un supra État nation ; et d'autre part, l'idée n'est pas de miner les mouvements sociaux aux niveaux nationaux en substituant le rapport de force existant dans l'État (héritage d'une histoire spécifique) à un rapport de force au niveau européen bien moins favorable à ces mouvements à cause de la non existence / non visibilité d'un espace public européen. Au contraire, l'idée est de participer à renforcer ces luttes en les liant au niveau européen. Si cela paraît peut-être abstrait, un exemple concret est celui des luttes dans le monde universitaire (et pas seulement) contre les réforme de l'université vers la privatisation de l'éducation, qui ont vu se soulever les Français, les Grecs, les Italiens, les Britanniques... Les rassemblements européens organisés notamment par Edufactory pour la défense de l'éducation publique sont un exemple positif de mise en commun d'expériences et de savoirs soutenus par Alternatives Européennes.

Les moyens d'action que nous utilisons sont entre autres la publication d'un magazine (imprimé et sur Internet) en plusieurs langues, l'organisation de campagnes (notamment sur la liberté de la presse), de débats, de flash-mobs, d'événements artistiques (performances, expositions...). Le temps fort de l'année est le festival Transeuropa (cette année du 6 au 15 mai), qui a lieu simultanément dans 12 villes d'Europe -dont Paris et Cluj-Napoca. Le festival est plutôt un moment dans le travail de l'organisation qu'un aboutissement. Les événements, artistiques et politiques, des traditionnelles expositions et débats aux expériences de marché social de troc à Cluj, chasse au trésor à Brixton, lectures de poésie à Bologne ou promenade urbaine à la Goutte d'Or à Paris, se répondent d'une ville à l'autre, pour qu'il y ait bien un festival et non douze. Bref, je pourrais continuer à en parler (écrire) longtemps, mais ça viendra plus tard très sûrement !

En janvier, après avoir fini les derniers examens, j'ai commencé à Paris un stage au bureau d'Alternatives Européennes (il y en a quatre, à Londres, Rome, Paris et Cluj-Napoca), qui se poursuit depuis le 15 mars à Cluj. Me voilà donc ici !